Restaurants à la réunion entre le pire et le médiocre

L’association nationale de défense des consommateurs et usagers (CLCV) a récemment publié une enquête sur l’hygiène des établissements alimentaires. Pour mémoire elle se base sur les résultats des contrôles sanitaires diligentés par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) au travers de ses directions départementale de la protection des populations (DDPP) disséminées sur tout le territoire. On pourra retrouver ces résultats en tout transparence sur le site alim’confiance site officiel qui gagne à être largement connu. Donc autant dire que l’enquête du CLCV se base sur des éléments factuels et officiels qui peuvent difficilement souffrir de contestation. On pourrait juste leur reprocher de jeter l’opprobre sur une région sur la base de quelques restaurants galeux, ainsi d’après le document du CLCV il y aurait 247000 restaurants en France (hors restauration collective) qui subissent autour de 16000 contrôles par an, on arrive donc grosso modo à un restaurant contrôlé sur 15 par an. Ce n’est franchement pas énorme, qui plus est ces contrôles ne sont uniformément pas répartis sur le territoire, ainsi la région Ile de France concentre 39% des contrôles ! Ça donne néanmoins une information statistique intéressante de la situation dans les régions.

Bref, ces éléments de contexte posés, on découvre dans cette enquête qu’on retrouve les départements d’outre mer (DOM) en queue de peloton du classement des établissements qui regroupent les restaurants, la restauration collective, les métiers de bouche et les commerces généralistes, avec la Réunion bon dernier !

A vrai dire cela ne m’étonne à moitié, certes l’hygiène se réfère plutôt à ce qui se passe dans les cuisines même si ça impacte au final la qualité de l’assiette et ne se réfère pas au niveau du service, mais globalement je constate que les restaurants à la Réunion oscillent entre le pire et le médiocre. On connaissait le serveur parisien pas souriant pour un sous et qui vous pousse vers la sortie histoire de multiplier les services mais qui globalement fait le taff, à la Réunion on a plutôt droit au serveur ramolli par la langueur de l’atmosphère insulaire et tropicale qui ne prête guère attention au client et qui se languit la fin du service. Le service est globalement assez déplorable et rares sont les restaurants qui sortent du l’eau. Parmi les piètres expériences je peux citer un restaurant coté sur Saint Gilles avec vue sur mer où nous avons attendu patiemment 1h15 qu’on veuille bien s’occuper de nous en essayant de faire durer nos apéritifs malgré plusieurs relances, finalement comme on mourrait de faim on a quitté les lieux, quelque peu en pétard. Je pense également à un restaurant sur Saint Denis où on a trouvé un cafard dans l’assiette et un autre à Cilaos classé parmi les meilleurs du cirque où le samedi soir la plupart des plats sur la carte n »étaient pas disponibles et celle-ci réduisait à peau de chagrin, du reste nous n’avons pas traîné dans le restaurant tellement on se caillait, le patron par économie mesquine n’avait pas daigné allumer le poêle qui trônait fièrement au milieu du restaurant et on y voyait strictement rien du tout au point qu’on a éclairé notre table avec nos lampes frontales.

Image d’illustration d’un restaurant que j’ai pris sur Cilaos et que je n’ai pas testé !

Parlons maintenant de ce qu’on trouve dans l’assiette, les restaurants profitent de la naïveté des touristes pour proposer des plats traditionnels réunionnais franchement médiocres à la préparation bâclée, j’ai découvert ainsi avec sidération un rougail saucisse préparé avec des patates , non c’est juste pas possible ! Je veux bien que la cuisine évolue avec son temps, mais quand on se vante de proposer une cuisine traditionnelle on en respecte a minima les canons.

Je déplore également la dégradation des tables d’hôte qu’on retrouve également dans les nombreux gites que compte l’île. Il y a encore quelques années de cela, on mangeait avec les propriétaires en comité restreint dans une ambiance familiale et conviviale avec des produits du cru préparés sur place. Maintenant la plupart des gites ont cédé aux sirènes du profit au détriment de l’authentique, y compris ceux au fin fond de Mafate. Ils se sont considérablement développés et accueillent chacun des randonneurs par dizaine et n’offrent plus qu’une sorte de cantine aseptisée et formatée où le propriétaire, voire l’employé, ne fait que déposer des plats et disparait. Le contact privilégié avec les locaux s’efface totalement et que dire des plats ! Ils sont maintenant à base de produits industriels achetés dans la grande surface de la côte et rapatriés à grand frais par hélicoptère dans un ballet quotidien particulièrement bruyant et peu écologique. Faire passer des saucisses de Toulouse pour des saucisses réunionnaises, il faut arrêter de prendre les touristes pour des crétins ! Cette dégradation est également accentuée par la recherche de la facilité et du profit immédiat qui pousse à l’uniformisation des pratiques des gites. Ainsi alors que la cuisine réunionnaise est traditionnellement très variée avec un usage poussé des produits locaux et de ce que peut offrir la nature luxuriante, dans les gites on va vous servir strictement la même chose, c’est à dire le plat de riz, les lentilles et les saucisses. Pour les randonneurs qui font tout un périple dans les cirques d’un gite à un autre, ils sont condamnés à manger tous les soirs la même chose ! Et je ne parle pas des tarifs qui a explosé en quelques années alors le service et l’authenticité prenaient le chemin inverse.

Une pension sur Mafate (je suis à gauche sur la photo), la pension comprend plusieurs salles de restauration commune dont l’entrée de l’une d’elle se trouve à gauche sur la photo de la poubelle verte

L’avis de ce post peut paraître biaisé car il repose certes sur l’étude du CLCV mais surtout sur mon expérience personnelle, néanmoins il rejoint majoritairement l’avis de locaux ayant vécu également en métropole et qui peuvent donc comparer le niveau de qualité et de service des restaurants. Il est très en retrait à la Réunion, malheureusement on retrouve ce constat dans d’autres secteurs du domaine privé comme du domaine public et la faute n’en revient pas forcément aux métropolitains qui s’installent sur place comme peuvent le prétendre beaucoup de réunionnais et de politiques locaux, c’est un état d’esprit général qui a été conditionné par des décennies d’assistanat qui ne poussent pas les gens à faire des efforts et à s’améliorer. Il est clair que ça sera difficile de changer cet état d’esprit d’un claquement de doigt, et rien aujourd’hui n’incite à l’optimisme. A ce sujet je vous renvoie vers mon mémoire sur les inégalités entre la métropole et l’outre-mer avec le cas particulier de la Réunion.

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